Architecture de crainte
Si vous aimez l’art et que la découverte du riche héritage et de la magnifique architecture des peintures à fresque vous intéresse, Shekhawati au Rajasthan devrait figurer en haut de votre programme. Située à environ 165 km de Jaipur, la capitale de l’État, la région de Shekhawati, qui consiste en un millier de villages et de villes tombant sous l’entité de Nawalgarh, Sikar, Jhunjhunu et des parties de Churu, Nagaur et Jaipur, abrite la plus grande concentration de fresques du monde.

La région tire son nom de Maha Rao Shekha Ji, qui était le fils du clan du Rajput Shekhawat et qui a régné au 15è siècle avec courage et bravoure. Après sa mort, ses descendants ont développé leur héritage durant des siècles grâce à différentes formes d’art et de culture et, ce, jusqu’à aujourd’hui. Elle s’appelle donc Shekhawati (le jardin de Rao Shekha). Au 18è et 19è siècles, les marchands marwaris, qui étaient attirés par la région suite à la déviation d’une grande partie du commerce par Shekhawati, auraient construit ces grandioses havelis ou maisons fortifiées. Riches et aisés, ils ont fait décorer les intérieurs et les extérieurs de peintures murales, représentant des thèmes comme les épopées du Ramayana et du Mahabharata ainsi que de la Krishna Leela (récit de la vie du Seigneur Krishna). On raconte également que les fresques auraient été introduites par les Rajputs de Shekhawati.

Alors que la cour extérieure de ces havelis est appelée mardana pour les hommes, la cour intérieure est appelée zenana pour les femmes. La plupart de ces fresques ont été peintes entre 1900 et 1930 par des chiteras (artistes) issus de la communauté kumhar (potier). Les fresques de Shekhawati ont été influencées par les écoles de peinture de Perse, de Jaipur et des Moghols et s’inspirait de la mythologie, des scènes de chasse et de la vie quotidienne. Elles ont considérablement changé sous l’influence britannique et l’impact de la technologie. En effet, au tournant du 19è siècle, des motifs tels que des voitures, des avions, des gramophones et des Anglais ont fait leur apparition. Cependant, ces peintures ont commencé à se détériorer suite à l’exposition constante aux éléments. Elles se sont écaillées et la peinture s’est enlevée. L’érosion, l’efflorescence des sels, les algues noires et la décoloration ont également joué leur rôle. La conservation semblait donc la seule solution. La Fondation Morarka a alors apporté son aide et a inauguré les travaux dans la région de Nawalgarh. Le plus grand défi consistait toutefois à traiter les fresques avec les matériaux traditionnels en intervenant le moins possible.

Une fois que la conservation a été prise en charge pour enlever la poussière, la végétation et la croissance biologique, elle a été suivie d’une phase de consolidation et de renforcement des dommages survenus dans différents segments de l’architecture des havelis. Grâce aux efforts continus fournis, ils sont désormais dans un état proche de la perfection. Certains ont été convertis en musées, d’autres en hôtels. Le musée de l’haveli de Morarka, qui compte à deux cours, a été construit en 1900 par Jairam Das Morarka. C’est une galerie à ciel ouvert qui affiche environ 700 fresques sur son mur. La porte d’entrée s’ouvre sur l’avant-cour. Une volée de marches conduit à une autre porte d’entrée vers la cour zenana. Les fresques présentes ici illustrent des rois et des reines, de la flore et de la faune, le Seigneur Ganesh et le Seigneur Krishna.
L’haveli d’Uttara, construit en 1890 par Keshar Dev Morarka, servait de pension et est désormais conservé. Vous pouvez observer des scènes d’un défilé militaire, la Rasa lila de Radha et Krishna, Shiva et Parvati sur un taureau et des portraits royaux. Les principaux éléments décoratifs ici sont de magnifiques fresques de styles moghol et rajput réalisées en respectant la technique du Rajasthan et effectuées sur du plâtre humide en recourant à des miroirs.

« Les couleurs des fresques de Shekhawati ont tenu des années, mais nous n’en savons pas grand chose. Ce qu’il en reste est beau, comme si la peinture datait de hier, » déclare Kamal Morarka, le président de la Fondation Morarka.
En plus de la conservation, quelques havelis de Nawalgarh ont été restaurés. Des fresques originales ont été repeintes avec des couleurs organiques afin de leur conférer une nouvelle vie. L’haveli du Dr Ramnath A. Podar, désormais converti en musée, est un exemple du travail de restauration mené sous une supervision professionnelle et il a fallu 10 ans pour rendre leur gloire d’antan aux fresques complexes. Le travail nécessitait l’utilisation de colorants végétaux et minéraux.

Afin de promouvoir l’art et la culture de Shekhawati et en faire une attraction touristique, la région célèbre son propre festival en février. Organisé conjointement par le département du tourisme de l’État et la Fondation Morarka, il comprend des circuits, de l’art, de l’artisanat, une foire du bétail, de la nourriture biologique et des jeux ruraux.